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Schiappa, les sénateurs. À l'audition de Mohamed Sifaoui sur le fonds Marianne, tout le monde en prend pour son grade

logo de L'Obs L'Obs 15.06.2023 23:54:06 www.nouvelobs.com

Il s'est dit « manipulé » et piégé. Mohamed Sifaoui, dont l'association est pointée du doigt dans la gestion controversée du fonds Marianne, a délivré une audition très offensive au Sénat ce jeudi 15 juin. A tour de rôle, il a dénoncé le pouvoir politique, l'administration ou encore les médias. « L'Obs » vous résume cette contre-attaque, aux allures de passe d'armes avec Marlène Schiappa, auditionnée la veille.

La Commission d'enquête du Sénat a entendu le journaliste sur la gestion controversée du fonds Marianne lancé en avril 2021 par Marlène Schiappa, alors ministre déléguée à la Citoyenneté, six mois après l'assassinat du professeur Samuel Paty. Ce fonds, initialement doté de 2,5 millions d'euros, visait à financer des associations luttant contre le « séparatisme » et l'islam radical sur les réseaux sociaux.

L'association dont Mohamed Sifaoui était directeur des opérations, l'Union des sociétés d'éducation physique et de préparation militaire (USEPPM), a été la principale bénéficiaire du fonds : 355 000 euros lui ont été octroyés.

« La première erreur que j'ai faite, c'est d'avoir fait confiance à Mme Schiappa (actuellement secrétaire d'Etat à l'Économie sociale et solidaire, N.D.L.R.), à ses équipes, d'avoir foncé », a déclaré Mohamed Sifaoui. Il a estimé avoir été « piégé, instrumentalisé », « trahi » et « manipulé par le pouvoir politique ».

Au lendemain de l'audition de la ministre, qui avait démenti « toute relation personnelle avec lui », Mohamed Sifaoui lui rend la pareille : « Marlène Schiappa n'a pas été mon amie », « elle le sera encore moins demain », ajoutant : « Je ne respecte pas les gens qui n'ont pas de courage ».

Il soutient qu'elle « n'est pas coupable de détournements d'argent », mais coupable « politiquement parlant ».

Les échanges avec le rapporteur et le président de la Commission sont vifs et agressifs. Mohamed Sifaoui dénonce le « lynchage médiatique », mais s'en prend aussi aux responsables. « M. le rapporteur, vous faites un raccourci malheureux [.] Est-ce que c'est clair ! », « ce que vous dites est ridicule, il y a des insinuations derrière », lance-t-il au rapporteur (LR) Jean-François Husson. Un « Amen » fuse, en conclusion d'un propos.

« Vous devez garder vos nerfs », recadre ce dernier.

« Je donne une réponse détaillée même si ça vous embête car l'heure du déjeuner approche », a même osé Mohamed Sifaoui, avant de prévenir : « Ne venez pas me piquer au vif. »

Mohamed Sifaoui a également attaqué le rapport « pathétique » de l'Inspection générale de l'administration (IGA) publié la semaine dernière : ce document avait relevé plusieurs irrégularités dans la gestion du fonds Marianne et notamment que « l'USEPPM n'était pas éligible au bénéfice d'un financement », du fait notamment « des manquements dans ses obligations déclaratives ».

L'essayiste relève que les auteurs du rapport ont commis une « erreur factuelle » dans la date de l'assassinat de Samuel Paty. Cela « prouve la légèreté, la précipitation, le manque de rigueur avec lequel ce rapport a été écrit ».

« L'IGA est dans une attitude d'auto-légitimation de l'administration [.] en essayant de [.] trouver des lampistes, en l'occurrence [.] moi-même et le préfet (Christian) Gravel », assène-t-il.

Christian Gravel, le patron du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR, l'organisme qui était en charge de la gestion de ce fond au ministère de l'Intérieur), également mis en cause dans le rapport de l'IGA, a démissionné la semaine dernière.

Sur le fond de l'affaire, Mohamed Sifaoui a affirmé avoir déposé son dossier « à la demande » de Marlène Schiappa. Et dit avoir appris « par voie de presse », « à travers une interview » de la ministre, le lancement du projet, le 20 avril, sous l'appellation fonds Marianne.

Tout en expliquant se rendre régulièrement au CIPDR. car lié par un autre contrat passé avec cette structure : un contrat de consultant, pour former des équipes, et pour lequel il a touché 39 500 euros hors taxes, courant de novembre 2020 à janvier 2023.

« J'ai une capacité de travail qui est bien supérieure à la normale, par passion, par intérêt intellectuel à la matière », expliquera Mohamed Siafoui, auquel le président de la commission fait remarquer qu'il était aussi salarié à plein temps, dans le contrat USEPPM mis en place à partir du lancement du fonds.

Remboursera-t-il une partie de la subvention reçue, comme le lui demande l'IGA ? « Ce sera une décision de justice, si remboursement il doit y avoir », rétorque-t-il.

vendredi 16 juin 2023 02:54:06 Categories: L'Obs

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