Liberation

Escroquerie par mail : 18 arrestations en France après des millions d'euros extorqués et des suicides de victimes

logo de Liberation Liberation 23.06.2023 10:54:52 LIBERATION, AFP
Les investigations ont été confiées aux policiers de l'Office central de lutte contre la cybercriminalité (OCLCTIC), aux gendarmes de la section des recherches (SR) de Versailles à ceux du ComCybergend et à la Brigade de recherches de Nice.

On ne l'apprend que ce vendredi 23 juin : policiers et gendarmes ont procédé lundi 19 juin à un vaste coup de filet en interpellant un total de 19 personnes, dont 18 en France, soupçonnées d'escroquerie à la fausse convocation judiciaire pour un préjudice évalué à au moins 3,5 millions d'euros. L'escroquerie à la fausse convocation judiciaire consiste à envoyer, au nom de responsables de la gendarmerie ou de la police, de magistrats ou d'institutions comme Europol, des courriels à des personnes indéterminées en les accusant notamment de pédopornographie via la consultation de sites internet illégaux. Les victimes sont menacées de poursuites judiciaires sauf si elles paient une «amende». Près de 400 personnes ont déposé plainte.

Dix-huit personnes ont été arrêtées en Ile-de-France, à Nantes, au Mans, Toulouse, Sens (Yonne), Orléans et Nice, la dernière en Belgique, ont indiqué la gendarmerie et la police dans un communiqué. A l'issue de leur garde à vue, quinze d'entre elles ont été convoquées devant le tribunal correctionnel pour être jugées pour accès et maintien dans un système de données, escroquerie et blanchiment d'escroquerie en bande organisée, a indiqué le parquet de Paris, sans préciser la date de l'audience.

«Les sommes versées par les victimes vont de moins de 5 000 euros à 150 000 voire 200 000 euros»

Le commissaire Christophe Durand

Les enquêteurs ont établi que l'argent escroqué était dépensé en France ou envoyé en Côte-d'Ivoire et dans d'autres pays africains. Début 2021, cette campagne d'hameçonnage (ou phishing) a inondé tout le territoire et conduit la section spécialisée dans la cybercriminalité du parquet de Paris à ouvrir une enquête. Ces investigations ont été confiées aux policiers de l'Office central de lutte contre la cybercriminalité (OCLCTIC), aux gendarmes de la section des recherches (SR) de Versailles à ceux du ComCybergend et à la Brigade de recherches de Nice, avec l'appui de l'agence européenne de police judiciaire Europol.

En juin 2022, la plateforme Pharos comptait 150 000 signalements ayant trait à cette escroquerie. Un an plus tard, son préjudice est évalué «a minima à 3,5 millions d'euros», a estimé le commissaire Christophe Durand de l'OCLCTIC. Les suspects ont entre 20 et 50 ans quand la moyenne d'âge de leurs victimes est autour de 60 ans. «Il y a une vraie détresse humaine derrière les profils des victimes», a fait valoir Durand. «Les sommes versées par les victimes vont de moins de 5 000 euros à 150 000 voire 200 000 euros», a expliqué le colonel Thomas Andreu de la SR de Versailles, en relevant que six personnes se sont donné la mort «potentiellement en lien avec cette escroquerie». Six enquêtes ont d'ailleurs été ouvertes pour recherche des causes de la mort.

«L'une des victimes a subi une double extorsion. Après un premier paiement à hauteur de 5 978 euros, les malfaiteurs lui ont demandé de payer à nouveau 7 480 euros. Se sentant impuissant et pris au piège, il s'est donné la mort», ont rapporté la police et la gendarmerie. «Nous pensions que l'escroquerie était pilotée par une structure centrale. En fait, il s'est avéré qu'il s'agissait de plusieurs petites équipes, une dizaine, n'ayant pas de lien entre elles», a poursuivi le colonel Andreu.

«Ces petites structures, c'est de l'opportunisme pur», a renchéri le commissaire Durand, soulignant que le système était «peu coûteux» pour les malfaiteurs comme l'est l'escroquerie à la «romance», qui consiste à feindre des sentiments amoureux pour une personne contactée via Internet pour lui extorquer de l'argent. L'escroquerie à la fausse convocation judiciaire a depuis fait «tache d'huile» en Europe, a poursuivi Durand, citant «l'Italie, la Roumanie et la Suisse». A tel point que la France a ouvert un dossier auprès d'Eurojust, l'agence de coopération judiciaire de l'Union européenne, en octobre 2022. Tant le colonel Andreu que le commissaire Durand se sont félicités de «la coopération parfaite» entre les services pour parvenir à ce coup de filet, qui espère-t-il, permettra de mettre en garde le grand public contre ces courriels frauduleux.

vendredi 23 juin 2023 13:54:52 Categories: Liberation

ShareButton
ShareButton
ShareButton
  • RSS

Suomi sisu kantaa
NorpaNet Beta 1.1.0.18818 - Firebird 5.0 LI-V6.3.2.1497

TetraSys Oy.

TetraSys Oy.