«On a cru à un attentat», racontent plusieurs témoins venus observer ce jeudi matin le bal incessant des véhicules de secours, qui déblayent le sol des débris jonchant le sol. Ces restes ont été soufflés par la violente explosion survenue ce mercredi en fin d'après-midi rue Saint-Jacques, dans le 5e arrondissement de la capitale.
Il était environ 16h45 lorsque la déflagration a été ressentie par les riverains. «J'étais dans ma voiture, cherchant à me garer, lorsque j'ai entendu comme un souffle», décrit le gérant d'une pizzeria située à quelques dizaines de mètres du numéro 277 de la rue, lieu de la déflagration. Julien, 27 ans et habitant un appartement situé entre un cabinet paramédical et une laverie, explique que tout s'est enchaîné très vite. «Je télétravaillais, lorsque j'ai entendu un gros bruit. J'ai entendu des gens crier que ça sentait le gaz et qu'il fallait partir, alors je suis descendu sans réfléchir», témoigne-t-il douloureusement.
En moins de quelques minutes, de nombreux camions de pompiers et véhicules sérigraphiés étaient présents pour faire évacuer la place Alphonse-Laveran, là où les flammes s'étaient emparées des morceaux du bâtiment encore fumants. «Cela aurait pu être bien pire», confie Julien. «D'habitude au mois de juin, c'est rempli ici. Beaucoup d'enfants, de collégiens et de lycéens sont scolarisés à proximité et viennent jouer au soleil.». Les bouts de verre cassés et disséminés autour du périmètre de sécurité attestent de la violence du souffle. Laura et Serap, toutes deux malentendantes, sont scolarisées à l'Institut national de jeunes sourds de Paris. À l'aide du langage des signes et d'un téléphone portable, elles décrivent «une explosion tellement forte [qu'elles ont pu] la ressentir».
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Autour d'elles, certains riverains traversent à la hâte le trottoir, traînant parfois au sol une petite valise à roulettes. Ces habitants du quartier ont été exceptionnellement autorisés à revenir chez eux pour récupérer des affaires le temps du nettoyage des lieux. «J'ai juste pu emporter le minimum pour trois jours», confie Baptiste, étudiant en école d'ingénieurs et logeant dans une résidence étudiante. «Ils ne nous ont pas dit quand on pourrait revenir», se désole-t-il. Pas question pour d'autres de retourner tout de suite dans leur logement. «La poutre porteuse de mon appartement s'est affaissée, je préfère aller loger ailleurs le temps qu'un expert vienne constater les dégâts», analyse Justine. Cette doctorante s'estime chanceuse : «Le verre des fenêtres a transpercé mes rideaux. Je ne pensais pas le dire un jour, mais le boulot m'a sûrement sauvé», acquiesce-t-elle dans un moment de détresse.
Ce jeudi matin, le bilan communiqué par le parquet de Paris faisait état d'au moins une cinquantaine de blessés, dont six évacuées en urgence absolue. Les secours s'activaient toujours pour trouver une personne portée disparue. Autour des lieux, près de 700 foyers étaient privés de gaz par mesure de sécurité. Si les premiers éléments disponibles font penser à une fuite de gaz, GRDF a indiqué que la cause du sinistre «ne pouvait pas être avancée». Selon plusieurs riverains, des travaux étaient engagés depuis plusieurs mois partout dans le quartier pour entretenir les tuyaux acheminant le précieux combustible. «On ne se sent pas en sécurité, il y a désormais comme une odeur étrange dans l'air», décrit Hervé, antiquaire du quartier implanté depuis 1994. «Cela fait plusieurs années que nous, commerçants, nous battons pour tenir la vie de quartier», murmure-t-il tristement.