Prendre du CBD ou conduire, il faut maintenant choisir. Telle est le sens de la décision rendue par la Cour de cassation. Dans un arrêt rendu ce mercredi, les juges ont estimé qu'un conducteur est coupable de conduite sous l'emprise de drogue si des traces de THC -substance classée comme stupéfiant- sont trouvées par le biais du test salivaire. Et qu'importe si elles sont liées à la prise de CBD, produit pourtant légal. Depuis plusieurs années, celui-ci est vendu en France à condition que la teneur en THC n'y excède pas 0,3%.
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En adoptant cette ligne dure, les juges suprêmes ouvrent la porte à des condamnations d'automobilistes en pagaille, eux qui obtenaient jusqu'alors la relaxe. Devant les tribunaux, les avocats apportaient en effet la preuve que leurs clients avaient pris du CBD, non du cannabis. Selon une circulaire de 2016, il suffit que le test salivaire soit positif pour constituer une infraction. Et ce, sans considération d'un taux quelconque, comme c'est le cas pour l'alcool. Les avocats ont donc pris l'habitude de compléter ce résultat sans nuance par une recherche du taux effectuée grâce à des tests sanguins ou capillaires : un taux faible indique une consommation de CBD.
Or, dans leur arrêt, les juges suprêmes ont cassé un jugement de la cour d'appel de Rouen, qui a relaxé un prévenu ayant indiqué avoir pris du CBD. Les juges de Rouen étaient même allés plus loin. En l'absence d'analyses sanguines ou capillaires réalisées dans cette affaire, une incertitude pesait sur la culpabilité du prévenu. Avait-il pris du CBD comme il l'affirmait ou du cannabis? Dans le doute, les magistrats ont prononcé la relaxe.
La Cour de cassation estime que les juges de Rouen ont méconnu les textes. Pour elle, l'infraction est bel et bien constituée «s'il est établi que le prévenu a conduit un véhicule après avoir fait usage d'une substance classée comme stupéfiant (NDLR: le THC), peu important la dose absorbée».
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Pour Me Rémy Josseaume, spécialiste du droit automobile, ce jugement est sidérant. «On est en plein docteur Jekyll et M. Hyde» dit-il. «D'un côté, l'État estime que le CBD est légal et le conseil d'État l'a confirmé en décembre dernier. De l'autre, on est sanctionné si on le consomme et si on prend le volant». Or les enjeux sont importants : pour le délit de drogue, le contrevenant est passible de deux ans de prison, 4500 euros d'amende, d'une perte de 6 points avec possibilité d'annulation ou suspension du permis.