Alors que s'ouvre un sommet à Paris, la responsable plaidoyer de l'ONG CARE dénonce sur franceinfo "un comportement schizophrène" des pays du G20 qui y participent tout en versant "500 milliards de dollars de subventions aux industries fossiles" tous les ans.
"On assiste à un bal de pompiers pyromanes", a estimé Fanny Petitbon, responsable du plaidoyer pour l'ONG CARE, jeudi 22 juin sur franceinfo, alors qu'un sommet se tient à Paris pour un nouveau pacte financier mondial. "D'un côté, les pays disent qu'ils veulent défendre le climat et de l'autre, tous les ans, les pays du G20 versent 500 milliards de dollars de subventions aux industries fossiles", a-t-elle déploté. Des ONG ont projeté sur la façade du palais Brongniart un message revendicatif pour réclamer une taxation des industries les plus polluantes.
franceinfo : La taxation des super-pollueurs est-elle essentielle ?
Fanny Petitbon : C'est le message essentiel parce qu'il faut que les gouvernements croissent leur financement pour aider les pays du Sud à faire face au changement climatique, mais on sait que cela ne suffira pas. Donc, il faut aller chercher l'argent là où il est, c'est-à-dire taxer les super-pollueurs, en particulier l'industrie des énergies fossiles qui s'est enrichie sur le dos de la planète et des populations les plus vulnérables tout au long des dernières décennies. Sur les vingt dernières années, elle a engrangé 60 fois plus de profits qu'il ne faut pour couvrir les pertes qui ont été subies par les pays du Sud face au changement climatique. Donc, l'argent existe, mais c'est la volonté politique qui manque.
Qu'attendez-vous de ce sommet ?
De restaurer la confiance qui a été brisée entre le Nord et le Sud. Les promesses financières pour aider les pays du Sud à faire face aux impacts du changement climatique, alors qu'ils n'en sont pas responsables, n'ont pas été tenues. On devrait avoir la confirmation cette année que la promesse de mobiliser 100 milliards de dollars de financement climat serait atteinte. Malheureusement, il n'y a pas de quoi se réjouir parce que ces financements sont principalement alloués sous forme de prêts et non de dons. Cela contribue à un surendettement de ces pays-là. Ils vont surtout à la réduction des émissions et pas tant à l'adaptation des techniques agricoles, des modes de vie.
"La facture des impacts climatiques s'est alourdie et on sait qu'on va avoir besoin de 2 000 milliards de dollars par an pour répondre à tous ces besoins dans les pays du Sud. Donc, on a vraiment besoin d'avoir un signal politique que les pays sont enfin prêts à contribuer à leur juste part et à aller taxer ceux qui pour l'instant continuent à agir en toute impunité."
sur franceinfo
Pourquoi parlez-vous d'hypocrisie ?
On pense que maintenant, on a suffisamment eu le temps d'explorer, donc on veut des engagements à ce sommet. Il va y avoir un engagement sur le soutien de cette nouvelle taxe sur le transport maritime, qui contribue énormément aux émissions globales des gaz à effet de serre mais qui n'est pas dans l'accord de Paris. Les chefs d'Etat peuvent dire qu'une partie des revenus collectés par cette future taxe pourraient aller au financement du climat, du développement.
"On attend une déclaration politique sur le lancement d'une coalition de ceux qui sont prêts à taxer les énergies fossiles."
sur franceinfo
On assiste à un bal de pompiers pyromanes. D'un côté, les pays disent qu'ils veulent défendre le climat et de l'autre, tous les ans, les pays du G20 versent 500 milliards de dollars de subventions aux industries fossiles. Donc, il y a quand même un comportement schizophrène.
Emmanuel Macron a déclaré "qu'aucun pays ne devrait avoir à choisir entre la lutte contre la pauvreté et la protection de la planète. Nous devons assumer un choc de financement public". Qu'en pensez-vous ?
C'est le constat d'une réalité que nous connaissons tous, c'est bien de le dire mais il faut passer à l'action. Les pays du Sud ont dit maintes fois que le temps des discours était fini. On a besoin d'avoir de la monnaie sonnante et trébuchante sur la table. Si on veut que ces pays s'engagent sur un développement décarboné, qu'ils sortent du cercle vicieux de la pauvreté, il va falloir qu'ils soient aidés par ceux qui ont contribué à cette dette climatique.