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Sous-marin Titan: les chances de retrouver des survivants s'amenuisent

logo de Le Figaro Le Figaro 21.06.2023 21:24:40 Vincent Bordenave
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Le temps passe et chaque minute écoulée diminue les chances de revoir un jour les cinq occupants du Titan. Ce petit sous-marin de tourisme a perdu contact avec son navire porteur alors qu'il partait explorer l'épave du Titanic, dimanche dernier. L'espoir a cependant été ravivé dans la nuit de mardi à mercredi quand les avions P-3 canadiens ont réussi à capter des sons à intervalles réguliers, laissant penser que l'équipage était possiblement encore en vie et qu'ils tentaient de se faire entendre en tapant sur la coque du submersible. La présence à bord du plongeur français Paul-Henri Nargeolet, 76 ans, réputé comme un des meilleures spécialistes de l'exploration sous-marine au monde, est pour certains la principale raison de rester optimiste.

Mais le sauvetage, s'il avait lieu, relèverait tout de même du miracle tant les conditions pour y parvenir semblent compliquées à réunir. Le Titan dispose d'une autonomie de 96 heures, ce qui signifie que passé jeudi midi, heure française, les passagers du sous-marin arriveront au bout des réserves d'oxygène. «Le temps joue contre eux et la première urgence est d'avoir la certitude que ces bruits sont bien originaires du sous-marin», commente Christian Pétron, ami de Paul-Henri Nargeolet, ancien officier de marine et directeur de la photographie sur le film Le Grand Bleu. «Ce qui est loin d'être acquis.» Le commandant du premier district des gardes-côtes américains, le contre-amiral John Mauger, a d'ailleurs précisé que l'origine des bruits n'était toujours pas certifiée.

«Comme le Titanic s'est disloqué en de nombreux morceaux métalliques sur des kilomètres carrés, la zone est un véritable champ d'échos métalliques, chacun semblable à ce que serait celui produit par le Titan», commente Bruce Shillito, enseignant-chercheur à Sorbonne Université, du laboratoire de biologie des organismes et écosystèmes aquatiques, spécialiste des recherches dans les grands fonds. «Donc même au sonar, le travail de localisation s'apparente à l'aiguille dans la botte de foin.»

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Une fois le sous-marin repéré (si cela arrivait), les opérations de sauvetage demanderaient encore du temps. «Envoyer sur place un sous-marin comme le Nautile se serait avéré contreproductif car trop chronophage, explique-t-on du côté de l'Ifremer. On est obligé de dérouter les vaisseaux les plus proches et de faire avec leur équipement.» Le navire océanographique de l'Ifremer l'Atalante devait ainsi arriver sur zone mercredi en fin de journée, rejoignant une flotte composée d'une dizaine d'autres bâtiments. Le navire français est équipé d'un robot câblé (ROV), Victor 6000, capable de descendre à 6000 mètres. Il devrait être mis à l'eau jeudi matin, entre 8 heures et 10 heures, heure locale, le temps que les «pilotes» du ROV puissent être héliportés sur l'Atalante. L'engin français vient s'ajouter à deux autres ROV déjà sur place pour scanner les fonds marins. Celui pouvant descendre à 4000 m est malheureusement inopérant, et le seul en opération est limité à 3000 m. Armé de deux bras articulés, Victor 6000 peut s'avérer déterminant pour libérer le sous-marin perdu, si celui-ci était coincé sous une partie de l'épave, ou bien pour accrocher un câble ou des bouées pour remonter le Titan à la surface, précise l'Ifremer. «Grâce à la présence d'un navire équipé d'un treuil pour les grands fonds, nous privilégions l'utilisation d'une remontée par câble, explique Goulwen Peltier, de la direction de la Flotte océanique à l'Ifremer. J'ai bon espoir qu'on réussisse à retrouver le sous-marin.»«Les secours sont complexes à organiser et cela prendra énormément de temps», s'inquiète de son côté Christian Pétron.

À bord, les conditions deviennent de plus en plus critiques au fil des minutes. Le manque d'oxygène est le danger principal pour les occupants. «Le savoir-faire de Paul-Henri peut faire gagner quelques heures, juge Christian Pétron. Il sait dans quelle position se mettre pour économiser l'air, mais malheureusement j'ai du mal à croire que cela sera suffisant.» Chaque respiration diminue le stock vital, mais rejette également du CO2, un gaz toxique qui est capturé par des cristaux de chaux sodée. «Chaque sachet de chaux a une durée d'efficacité limitée, il faut alors changer les sacs régulièrement, en fonction des mesures des capteurs dans l'habitacle, explique Bruce Shillito. Pour tenir quatre jours, on parle alors d'un stock de plusieurs kilogrammes de chaux sodée.» Autre difficulté, la température à bord du sous-marin va chuter. «À plus de 1000 m de fond, la température est très stable et homogène, entre 1 et 4 °C, précise Bruce Shillito. Sans chauffage autre que les corps des passagers, il est à craindre qu'il fasse aussi froid à l'intérieur de l'habitacle au bout de quelques heures. Dans les submersibles scientifiques profonds, le chauffage n'est pas prévu, car cela consomme beaucoup trop d'énergie. En temps normal les gens s'équipent alors de vêtements adéquats qui permettent de supporter une plongée de plusieurs heures.» Rappelons que Paul-Henri Nargeolet, et les quatre autres occupants étaient initialement partis pour une plongée de huit heures.

jeudi 22 juin 2023 00:24:40 Categories: Le Figaro

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