La présidente du Conseil italien et le président Français se sont entretenus durant une heure en fin d'après-midi, mardi 20 juin. Ukraine, immigration. L'un et l'autre ont tenté de réchauffer une relation abîmée par de multiples crises.
La visite a été annoncée en toute discrétion, samedi 17 juin, par le palais Chigi, résidence du président du Conseil italien. Giorgia Meloni viendrait à Paris le mardi suivant et pousserait jusqu'au mercredi matin, grand maximum, afin de soutenir la candidature de l'Italie pour l'exposition universelle de 2030 lors d'une réunion internationale sur le sujet dans le XVIe arrondissement. La « Primier » est finalement repartie le soir même, non sans avoir rencontré Emmanuel Macron à l'Elysée. Actant sa première visite officielle en France, huit longs mois après son entrée en fonction.
Devant la presse, Emmanuel Macron réaffirmé ce « rapport unique entre Italie et la France », vantant « cette amitié » qui résiste au-delà « des controverses » et célébrant cette « histoire plus profonde », « cette aventure collective » et « nos artistes » communs. Le chef de l'État se permettant même de tutoyer son homologue tout en lui promettant de travailler de concert pour « organiser plus efficacement l'asile et la migration en Europe » - « en accord avec nos valeurs », précisait-il -, de renforcer les liens dans le cadre d'une défense européenne et saluant « la très grande clarté de l'engagement [de Meloni] » dans le conflit ukrainien. Cette dernière ayant particulièrement impliqué son pays dans le soutien militaire à l'Ukraine.
La présidente du Conseil a naturellement retourné ses amabilités au président français, tentant de faire oublier les tensions, palpables, entre les deux dirigeants depuis la victoire aux législatives et sénatoriales italiennes, fin septembre, de la coalition réunissant Fratelli d'Italia de Meloni, la Ligue de Salvini et de Forza Italia du défunt Berlusconi.
Début octobre, la secrétaire d'État française chargée de l'Europe, Laurence Boone, déclenchait les hostilités en intimant le nouveau gouvernement nationaliste au « respect des valeurs et des règles de l'État de droit » dans un entretien à « La Repubblica ». Furtive, ensuite, fut la rencontre entre le président de la République et Giorgia Meloni, fin octobre, quelques heures à peine après sa prise de fonctions. Profitant d'une visite officielle au pape François, Emmanuel Macron s'était entretenu, une heure durant, avec la quadragénaire dans un lieu tenu secret, bien à l'abri des caméras.
Il est nécessaire de comprendre que quelque chose n'a pas fonctionné
À mille lieux des démonstrations d'amitié publiques envers Mario Draghi, notamment dans le cadre de la guerre en Ukraine. La « Primier » d'aujourd'hui ayant été ostensiblement tenue éloignée des discussions entre la France et l'Allemagne, quand Macron prenait la pose aux côtés du prédécesseur de Meloni dans le train le menant à Kiev en juin 2022. La crise de l'Ocean Viking en novembre et la saillie de Gérald Darmanin, début mai, sur la politique migratoire de Meloni - pour mieux attaquer celle prônée par le Rassemblement national - achevaient d'abîmer des rapports déjà exécrables. Le ministre des Affaires étrangères italien annulant même sa visite à Paris dans la foulée de la sortie du locataire de Beauvau.
L'immigration en Europe, justement, a occupé une place de choix dans l'intervention de Giorgia Meloni, qui a, à son tour, salué la volonté d'Emmanuel Macron de s'impliquer dans la crise migratoire en Tunisie et en Libye. Mais se montrait un brin plus martiale : « Il est nécessaire de comprendre que quelque chose n'a pas fonctionné. » Comprendre : mener une politique « centrée sur les investissements » dans les pays d'émigration pour juguler le flux vers l'Europe alors que l'Italie est en première ligne sur l'accueil des bateaux venus d'Afrique. A voir si ces recommandations compteront lors du Conseil européen des 29 et 20 juin et au sommet de Vilnius sur l'Otan, prévu les 11 et 12 juillet.