Le 17 novembre 2022, le secrétaire d'Etat à la mer, Hervé Berville, disait que l'administration avait lancé une «enquête interne» sur le naufrage d'un canot au large de Calais (Pas-de-Calais), le 24 novembre 2021, qui emportait 27 passagers, majoritairement des Kurdes irakiens, âgés de 7 à 46 ans. Quelques jours plus tôt, un article du Monde précisait les conditions du naufrage, et la quinzaine d'appels au secours passé par les migrants en train de se noyer ce jour-là, sans que personne ne leur vienne en aide, ni côté français ni côté britannique, chacun passant la nuit à se renvoyer la balle selon des documents de l'enquête. Devant l'Assemblée nationale, Hervé Berville promettait : «Bien évidemment, si ces faits sont avérés, si ces personnes étaient dans les eaux françaises et qu'à un quelconque moment il y a eu manquement ou erreur, les sanctions seront prises. Soyez-en assurés.» Sept mois après ces déclarations, le Monde révèle ce mardi 13 juin que contrairement à ce que promettait le secrétaire d'Etat à la mer, aucune investigation n'a été entreprise par l'administration.
Si le ministère a d'abord refusé de s'exprimer auprès du journal, prétextant l'enquête judiciaire en cours, il a fini par «préciser» ses propos, qui «faisaient référence à une enquête interne menée en 2021 à la suite de l'événement. Il n'a donc pas fait d'annonce de nouveaux éléments». Une investigation interne dont l'existence n'a jamais «été montrée» d'après les conclusions des enquêteurs de la gendarmerie remises à la juge d'instruction. Seul un rapport du directeur du Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage Gris-Nez remis en mars 2022 au préfet maritime, un «rapport, qui n'engage que son auteur» précisent les gendarmes.
Dans cette affaire, cinq militaires ont été mis en examen le 25 mai à Paris pour non-assistance à personne en danger, trois femmes et deux hommes en fonction au moment des faits au Cross Gris-Nez, chargé des secours dans la Manche, ainsi que de deux membres d'équipage du Flamant, un patrouilleur de l'Etat qui naviguait à proximité au moment des faits. Ces mises en examen ont fait suite aux gardes à vue d'une dizaine de personnes puis à leur présentation devant le magistrat instructeur de la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée du tribunal judiciaire de Paris.